Que sais-je? (EVENEMENTS)

Hommage à Jean-François BACH (4 Février 2025 à l’Académie des Sciences). Jean-François BACH, membre de l’Académie des Sciences, médecin et scientifique a débuté sa carrière dans l’équipe de Jean Hamburger à l’hôpital Necker Enfants Malades. Après une thèse de sciences brillante, il devint rapidement professeur d’immunologie (Université Paris Descartes), chef d’un service d’immunologie clinique et directeur d’une unité de recherche (U25) affiliée à l’Inserm et au CNRS sur ce même site. (Extraits) Séance solennelle de l’Académie des sciences, Discours sous la Coupole de l’Institut de France (17 juin 2008). L’individu biologique – La part respective de la génétique, de l’environnement et du hasard. Deux importants colloques se sont tenus, au cours de ces derniers mois, respectivement au siège de la Fondation del Duca de l’Institut de France et à l’Académie des Sciences. Le premier concernait l’identité changeante de l’individu, le second l’épigénétique. Ces deux colloques, ainsi que des réflexions et des travaux personnels, me conduisent à vous parler, aujourd’hui, de l’individualité biologique en distinguant la part respective de la génétique, de l’environnement et du hasard.
Salle Ovale réception privée, Communauté des usagers chercheur-e-s de la BnF. (2024).
Si personne ne peut nier l’existence d’une identité propre à chaque individu, rien n’apparait plus difficile que d’en cerner les contours, tant cette identité est multifactorielle et changeante dans le temps. Il est, en particulier, très délicat de faire la part de ce qui est proprement biologique et de ce qui relève de l’environnement social. Pour aborder cette question, il est intéressant d’examiner deux situations dans lesquelles on peut suivre l’évolution de deux êtres ayant le même patrimoine génétique. L’une de ces situations est naturelle, consituée par les « vrais jumeaux ». L’autre est créée expérimentalement par le clonage reproductif, qui permet de produire in vitro la copie d’un individu ayant le même patrimoine génétique et transférant le noyau d’une cellule somatique, par exemple une cellule de peau, dans un ovocyte. Il arrive dans moins de 0,5 % des grossesses que l’oeuf, produit de la fécondation d’un ovocyte par un spermatozoïde, se scinde en deux cellules identiques, qui donneront lieu au développement parallèle de deux vrais jumeaux. Les deux jumeaux dits monozygotes sont authentiquement deux clones, au sens où on l’entend dans le clonage reproductif. On distingue en génétique le génotype qui est inscrit dans l’ADN, et le phénotype qui est le produit de l’expression des gènes, qui varie selon les cellules, qui contiennent pourtant le même ADN.
Les vrais jumeaux possèdent le même génotype. On admettait donc, encore récemment, que toutes les différences phénotypiques présentées par deux « vrais jumeaux » étaient dues à des différences de l’environnement auquel ils ont été exposés, en remarquant cependant, la grande similitude de l’environnement dans l’enfance lorsque, comme c’est habituellement le cas, les deux jumeaux sont élevées dans le même foyer, avec la tendance, parfois un peu naïve, de forcer la similitude en traitant les deux jumeaux, de façon plus proche qu’on ne le fait avec deux frères ou soeurs non jumeaux, allant même jusqu’à la caricature d’un habillement identique.
La jumelle Monozygote qui porte l’enfant dans ses bras et qui l’élève au plus haut sommet (éducation) n’est pas nécessairement celle qui porte la bague au doigt (mère biologique).
La définition de l’environnement diffère beaucoup chez l’écologiste et le généticien. Pour le premier, l’environnement est avant tout matériel, physique ou chimique. Pour le second, il inclut aussi tous les autres facteurs qui peuvent interagir avec l’expression des gènes, que ces facteurs soient biologiques (comme les infections), comportementaux, éducationnels ou culturels. Les vrais jumeaux et le clonage reproductif offrent une opportunité remarquable pour étudier le rôle de l’environnement, défini par le généticien, sur l’expression des gènes. Nous n’aborderons pas le sujet complexe des concordances et des discordances entre les vrais jumeaux pour ce qui concerne l’intelligence, le profil psychologique, le comportement ou les croyances. Peut-être, cependant, pouvons-nous rappeler, ici, avec ironie attristée les travaux controversés de Sir Cyril Burt, longtemps considéré comme le fondateur de la psychologie pédiatrique. A partir de l’étude d’une cohorte d’une cinquantaine de vrais jumeaux élevés séparément dans l’enfance comparée à une cohorte de vrais jumeaux élevés ensemble. Burt avait conclu au rôle primordial des facteurs génétiques dans l’intelligence devant la similarité des performances intellectuelles des vrais jumeaux qu’ils aient ou non été séparés dans l’enfance.En fait, les travaux de Burt se sont révélés, après la mort de ce dernier en 1970, le produit d’une fraude scientifique. Les couples de jumeaux séparés n’existaient pas et avaient été créés de toute pièce. Les données disponibles sur les marqueurs et fonctions biologiques sont, en revanche, plus claires. Les vrais jumeaux se ressemblent beaucoup plus que tout aute couple d’individus mais cette similitude n’est pas absolue. Ainsi les marqueurs biométriques tels que les empreintes digitales, l’iris ou la voix présentent des différences très significatives entre deux vrais jumeaux. Il en est de même pour le système immunitaire. La reconnaissance des antigènes par les lymphocytes fait intervenir des récepteurs de membrane spécifiques de l’antigène, codés par un ensemble limité de gènes donnant lieu à des réarrangements. Ces récepteurs sont plus semblables entre deux vrais jumeaux qu’entre deux frères ou soeurs ordinaires mais ils diffèrent sensiblement. Il en est de même pour des souris de souches pures, obtenues après reproduction endogamique répétée, qui sont homozygotes et identiques pour tous les gènes. Ces souris ne développent pas le même répertoire immunologique, même quand elles sont élevées dans une même cage et dans des conditions apparemment identiques .

L’héritage de Jérome LEJEUNE : Adam et Eve ou le Monogénisme, 2 février 1968 ».
La gémellité originelle : Adam et Eve « Un oeuf fécondé, mâle se clive en deux dont l’un se développe normalement, l’autre ayant perdu son chromosome Y lors de la séparation prend un aspect féminin, l’individu qui en résulte est très exactement un fragment du mâle dont il est issu. Ce type de gémellité extraordinaire est évidemment très rare, mais on connait plusieurs exemples dans lesquels l’un des sujets était infécond ou infertile. »
L’Ancien Testament ne désigne pas explicitement Adam et Eve comme des jumeaux. C’est à partir de la même chair que Dieu crée deux êtres séparés et de sexes opposés. Le mythe d’Adam et Eve provient probablement d’un mythe fondateur beaucoup plus ancien, celui de l’androgyne, c’est à dire d’une première créature à la fois homme et femme portant en elle l’origine de l’humanité. L’idée d’androgyne se retrouve dans la plupart des mythes de la création. Mon hypothèse adamique : un oeuf fécondé, femelle se clive en deux, l’un se développe normalement en un individu de sexe féminin, l’autre ayant gagné un Y (XXY) lors de la séparation (méiose, mitose) prend un aspect masculin (testicular feminization syndrome : hernie inguinale bilatérale, testis ). L’individu qui en résulte est très exactement un fragment de la femelle dont il est issu (vigueur sexuelle et fertilité) et possède les sécrétions et hormones sexuelles (testiculaires), qui sont les déterminants de la masculinisation.
Le facteur de transcription SRY détermine le sexe masculin alors que l’absence de SRY et le récepteur d’hormone nucléaire DAX1 contribue au sexe féminin.
V -Mary F. LYON, Susan G.Hawkes, X-linked Gene for Testicular Feminization in the mouse, 1970.

MIR.POP’UP FROM IGNORANCE ParisMP@2025